J’avais dix ans et déjà je parcourais les labours collants de ma terre Briarde à la recherche des objets du passé exhumés par les charrues.
Lorsque je revenais à la maison, crotté de boue de la tête aux pieds, le scénario était toujours le même, ma mère, feignant la colère me criait : « Mon dieu Marco ! tu as vu dans quel état tu es ?… file vite te changer avant que ton père ne rentre. »
Ensuite, à l’abri des regards, dans la douceur de ma chambre à coucher, j’ouvrais le sac à goûter contenant mon butin de la journée et étalais mon trésor de guerre sur la tablette de mon secrétaire. Ma récolte était assez éclectique : fers à chevaux, pierres polies et taillées, déchets métalliques en tous genres… Mais ce qui m’attirait, me fascinait, c’était les magnifiques morceaux de poteries rouges couverts de motifs représentant des scènes de chasse, de guerre, ou des animaux fabuleux. Je rêvais en voyant ces superbes chevaux à moitié poissons courir sur la terre cuite brillante, espérant secrètement dans mon imaginaire d’enfant que ces créatures aient vraiment existé dans le passé.
Anatole, le vieux cantonnier, m’avait appris que les tessons dataient de l’époque des Romains, « avant Napoléon » avait-il cru bon d’ajouter. Mon instituteur, monsieur Parly appelait cela : « céramique sigillée gallo-romaine ».
Ce maître d’école était un passionné de la période antique et passait son temps libre à fouiller la colline proche du village. En hiver, il continuait à creuser, réchauffant ses doigts gelés avec un vieux briquet fabriqué par les Poilus des tranchées.
Un jeudi matin, avec mon cousin Eric, nous avions repéré deux personnes curieusement affairées dans le Champ des Moines, ils utilisaient des engins que je ne connaissais pas pour chercher dans le sol.
C’est ce jour là que j’ai vu pour la première fois des détecteurs de métaux.
Les hommes nous questionnèrent sur un avion qui aurait été abattu pendant la seconde guerre mondiale…
Nous ne répondîmes pas et tournèrent les talons, c’étaient des étrangers, sûrement même des Parisiens.
Sur le chemin Eric me dit :
« Parisiens têtes de chiens » !
— « Parigots têtes de veaux » ! rétorquai-je aussitôt. »
Ensuite, nous partîmes dans un énorme fou rire.
Commentaires de l’ancien blog
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— sylviane 02/01/2011 12:45
Est ce vraiment des poteries que tu as ramassées? Tu as du trouver leur histoire quelques part. Anatole était très nature mais loin d’être bête, je ne connais pas son histoire et personne ne la
connaîtra car je crois qu’il n’avait pas de famille.
Des étrangers des Parisiens, tu déconnes, nous sommes citoyen du monde!!!
Bises
— Lily 23/12/2010 21:31
Bonsoir Marco,
Je suis venue faire un petit tour pour voir tes nouveaux textes. Merci pour ce moment d’évasion. Bises.
— Nanou 12/12/2010 09:47
super tes trésors !! tu as eu une belle enfance !! tu me fais penser à mon homme qui avec sa poele à frire parcourt la campagne.Ce n’est pas moins ce qu’il découvre comme pieces ou autre que la
nature qu’il admire en cherchant le trésor qui le pousse à faire ces recherches !! bises nanou
— Majo 12/12/2010 09:11
Tu sais tellement bien faire partager tes sentiments par l’écrit. Est ce pareil au quotidien ? Bravo pour ces textes qui sont si agréables à lire